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Actualités

2015-11-23

Récolte de nèfles à Revin (F)

C'est la saison des récoltes sur le néflier (Mespilus germanica). En Ardennes françaises, une belle production de ces fruits nous a été récemment signalée par un partenaire de l'Office National des Forêts (ONF). Quelques jours plus tard, nous arrivions sur site avec une équipe de 3 personnes pour les récolter.

Pourquoi le néflier?

C'est une essence particulière, oubliée de nos contrées et forêts, mais possédant de nombreux intérêts. Elle mérite toute notre attention, et d'autant plus au travers d'un projet tel que le LIFE Elia-RTE !

Le néflier est une essence relativement capricieuse pour sa germination et sa levée de dormance. La dormance est l'arrêt momentané de développement des graines, bourgeons, durant la période hivernale. La levée de dormance permet de mettre fin à cet arrêt, notamment en utilisant le froid. La durée de la dormance est liée à chaque espèce. Pour le néflier, elle s'étend sur une période de 2 à 4 ans. Il est donc nécessaire d'avoir, tout particulièrement pour cette espèce, une vision sur le long terme.

C'est ainsi que, dans une optique « d'after-LIFE » assurant la pérennité de nos actions après la fin du projet actuel, il est intéressant d'anticiper, de prendre le temps dès maintenant de récolter des graines telles que celles du néflier, afin de pouvoir être sûrs de pouvoir proposer dans le futur des plants de cette essence secondaire et ce, en quantité suffisante et d'origine locale avérée.

La récolte à Revin

En matinée, l'équipe a récolté des nèfles à Revin, où se trouve une belle population d'au moins 15-20 individus portant excessivement bien cette année (les fruits, forts visibles, étant toujours sur les arbres). Ce site nous a été renseigné par Michel Colcy de l'ONF, attentif aux actions LIFE et à leurs suites.

Fig.1.- Nèfles présentes en quantité

Les pieds de néfliers sont concentrés sur une zone assez restreinte, bien ensoleillée, exposée au sud et sur une légère pente. Des cas tels que celui-ci constituent une belle opportunité. Habituellement peu présent en forêt, le néflier l'est encore moins en de telles concentrations. Le milieu certainement plus que favorable, ainsi que la gestion attentive et respectueuse du forestier ont clairement dû y contribuer.

La récolte par secouage de l'arbre, une bâche au pied, a fort bien fonctionné pour les fruits les plus  mûrs. Pour le reste, ils ont simplement été cueillis directement sur l'arbre ou par terre pour ceux tombés au sol. C'est un peu moins de 20kg de fruits qui ont été récoltés sur le site.

Fig.2.-  Récolte des fruits

Le néflier et ses intérêts

Il faut noter que les fruits, relativement charnus, plaisent particulièrement aux oiseaux tels que grives et merles, mais également  au gibier.

Au niveau des utilisations ou de ses propriétés, le néflier n'est pas en reste ! En effet, sa croissance très lente et son bois très dur, homogène et dense (sans exclure sa souplesse) en font de bons manches de couteaux basques typiques, outils, ou encore cannes. Une de ses utilisations typiques du pays basque est la production de bâtons de marche renommés, appelés Makilha. La dimension de ces objets étant évidemment limitée par le port tortueux et la faible taille de l'arbre en général. En plus de ceci, les fruits (appelés vulgairement Cul de chien) peuvent se consommer sous diverses formes (gelées, confitures, tartes, crus, etc). Alors qu'au niveau biodiversité, le néflier procure abri et alimentation aux oiseaux, insectes et micro-mammifères et apporte une diversité génétique au niveau des essences secondaires de nos haies, lisières et sous-bois. C'est un hôte essentiel de nos lisières.

Fig.3.- Nèfle au sol (son mélange à la litière permet aux graines d'être exposées à l'acide humique produit par la matière organique en décomposition et de favoriser ainsi leur germination)

Le traitement des fruits

L'après-midi, quant à elle, fut marqué par notre arrivée au Comptoir Forestier de Marche-en-Famenne du Service Public de Wallonie. Cette structure s'occupe de la récolte de graines d'origine locale et contrôlée provenant de peuplements et vergers à graines, de leur extraction, de la levée de dormance et finalement de la revente aux pépiniéristes. C'est un partenaire essentiel de notre projet pour les actions de restaurations et de création de lisières, mais aussi d'implantation des vergers des essences forestières fruitières.

Après la pesée de la récolte, un peu moins de 20 kg, l'extraction en elle-même est très simple, il suffit d'installer les fruits entre deux tamis, qu'on pose sur une claie. Il est préférable de se mettre au-dessus du tout pour éviter que les tamis ne bougent et ne laissent s'échapper les graines minutieusement récoltées. On passe ensuite un coup de karcher® afin de faire éclater les fruits sous la pression du jet (ceci fonctionne mieux si les fruits sont déjà dans un état de maturité avancé, ou idéalement blets).

Fig.4.- Préparation des graines pour l'extraction

Fait important, seuls les fruits des espèces dont les graines sont fortement résistantes peuvent subir un tel traitement (c'est-à-dire nèfles, cenelles d'aubépine ou encore prunelles), sinon, sous la force de l'opération, les graines finissent abîmées et inutilisables.

Fig.5.- Extraction des graines au karcher ®

Au final, un peu moins de 2 kg de graines, humides et non-triées (présence de quelques restes de débris et déchets divers) ont été extraites.  Le séchage des prochains jours et le tri à l'aide d'un densitomètre nous permettra de connaître le poids exact des graines produites.  Ce poids définitif nous permettra d'évaluer le nombre de graines sachant que 1 kg de graines correspond à environ 6.000 à 8.000 graines.

Le comptoir à graines pourra tester différentes techniques afin de réduire la durée de la levée de dormance, par abrasion des téguments notamment. Cela permettra de fournir des plants d'ici 5 ans qui pourront enrichir les forêts des environs de Revin et les couloirs de sécurité des lignes haute tension gérées par RTE.